Et c’est reparti : C’est sur ces mots-là que ma Timeline Facebook s’est ouverte mardi 22 mars 2016, sonnant le glas de notre tranquillité de citoyen, enterrant une fois encore nos faux espoirs d’une vie meilleure. “Et c’est reparti !” Plus de quatre mois après les attentats aux terrasses de Paris et dans le Bataclan, on reprend conscience, d’une seconde à l’autre, que non, rien n’a changé. Sinon peut-être en pire.
“Et c’est reparti !” Alors, vacant à nos quotidiens au travail ou ailleurs parce que, malgré tout, dit-on, la vie continue, on a allumé nos télés, guetté en boucle les petites informations qui filtraient au compte-gouttes sur un site ou un autre, devenant au fil de la journée de plus en plus importantes, fatales, tragiques, macabres, horrible mais hélas, si prévisibles. “Et c’est reparti !” Soudain, très vite, la terreur qui s’était emparée de nous en novembre 2015 semble s’être vite, trop vite dissipée [Peut-être n’ai-je pas beaucoup d’amis Bruxellois, ceci expliquant cela.] Toujours est-il qu’en moins de 24 heures, nous avions presque tous déjà zappé, préférant des émissions divertissantes à ces chaînes d’info qui distillaient, comme je l’ai entendu à mon grand étonnement, un “flux anxiogène”. “Et c’est reparti !” J’ai attendu une journée pour écrire cet article et essayer de traduire avec des mots mon sentiment au lendemain des attentats dans l’aéroport de Zaventem et dans le métro de Bruxelles. Et la seule chose qui me vient à l’esprit c’est ça : “Et c’est reparti !” Et j’ai encore plus peur.
J’ai peur, car j’ai l’amère impression que tout un chacun se sent aujourd’hui blasé. “Ça devait arriver”, “c’était prévisible”, “on s’y attendait”. J’aimerais que ces personnes-là essaient de tenir le même discours face aux proches des victimes. Qu’ils leur disent que bien sûr, eux, ils s’y attendaient, contrairement à ce jeune Bruxellois parti prendre le métro pour aller bosser tôt le matin et qui n’a pas été assez lucide pour prévoir qu’il n’aurait pas la chance de rentrer chez lui pour savourer sa bière le soir-même, comme tous les autres soirs. Qu’ils lui disent, aussi, à l’épouse de celui qui attendait dans le hall d’embarquement et qui n’aura pas eu la chance de revoir sa famille après son aller-retour en avion parce que son aller à lui, il se faisait sans retour. Qu’on leur dise à tous ces gens touchés de près ou de loin, parce que l’un de leurs frères est entre la vie et la mort, que l’une de leurs sœurs a été grièvement blessée, qu’on leur dise que “c’était prévisible”.
Je suis triste, amère et déçue, parce que j’ai la nette impression qu’on réagit tous, peut-être naturellement, comme si on nous projetait à nouveau un film qu’on avait déjà vu la semaine dernière, et qu’avant même la fin, on avait décidé de quitter la salle. “Et c’est reparti !”. Cette phrase me fait penser à d’autres : encore le même refrain, toujours la même rengaine, comme une éternelle ritournelle. Les mêmes mots qui reviennent en boucle : “déflagration”, “kamikazes”, “minute de silence”, “drapeaux en berne”. Et déjà, les fils d’actu Facebook et consorts s’animent, presque égoïstement, comme si hier était déjà loin. “Je vais pas pouvoir prendre mon avion bordel” : la valse incessante de l’égoïsme 2.0 a déjà repris. “Et c’est reparti !” Ces mots me filent la gerbe, parce qu’ils sous-entendent qu’on a tous décidé de vivre avec ça. Avec cet enfer, ce cauchemar éveillé. Et ça me fait encore plus peur que le cauchemar en lui-même.
Originaire de Marseille depuis 34 ans, installée à Aix-en-Provence. N'aime ni l'air chaud du métro, ni les fruits de mer. Mexican Tacos Addict. Écrit aussi pour Sessùn et Konbini.
“Et c’est reparti”. En fait ça ne s’est pas arrêté. En fait depuis Madrid, depuis Londres, depuis Paris, nos vies n’ont fait qu’osciller entre l’indignation de devoir enterrer nos morts et l’urgence vitale de continuer pour dire à ces terroristes “ta terreur, elle ne passera pas par moi”.
La meilleure réponse à tout cela c’est de vivre. Ça n’efface pas le traumatisme, ça n’enlève pas les pensées. Mais vivre c’est ce que nous savons faire de mieux. Vivre c’est la mission que Dieu nous a donnée. Vivre c’est la meilleure réponse (en forme de gros fuck) à ces obscurantistes qui veulent nous étouffer.
Alors continue à nous balancer des playlist, parce qu’elle nous font vivre 😉
Continue à nous montrer les jolies choses, parce qu’elles nous font du bien 😉
Continue à nous faire baver avec Calvi on the Rocks, parce que ce festival nous fait rêver 😉 Vivons !